Cette nouvelle étude contredit l’idée reçue d’un « biais technologique » inéluctable, selon lequel les grandes innovations affectant le travail, tels que l’automatisation ou l’intelligence artificielle, aggraveraient les inégalités femmes-hommes sur le marché du travail. Au contraire, le rapport établit que ces évolutions constituent une opportunité de progresser vers davantage de mixité au sein de l’économie.
« La résorption du gender gap constitue un enjeu majeur : la pleine intégration des femmes dans la population active pourrait représenter une hausse de 2 100 milliards de dollars du PIB annuel de l’Europe occidentale et de 330 milliards de dollars pour la France. Nous avons une opportunité historique d’avancer en ce sens » souligne Sandra Sancier-Sultan, senior partner de McKinsey et coauteure de l’étude. « Avec les mutations qui vont intervenir sur le marché du travail, de nouvelles voies professionnelles s’ouvriront pour les femmes, à condition qu’elles renforcent les compétences qui seront au cœur des emplois de demain ».
Parmi les conclusions du rapport :
Le futur du travail, une opportunité vers plus de parité professionnelle
- Contrairement à l’Allemagne où les effets seront neutres, en France, l’impact des nouvelles technologies sur le travail pourrait jouer en faveur de l’intégration professionnelle des femmes, avec une prévision d’augmentation de 0,5 point de pourcentage de leur taux d’activité, qui serait porté à 48,8% d’ici 2030.
- Les femmes seront particulièrement bien positionnées, dans certains secteurs, pour bénéficier des créations d’emplois suscitées par la révolution technologique : le secteur de la santé et de l’aide sociale en France, où les femmes occupent à ce jour 72% des emplois, sera en forte croissance avec 1,15 million d’emplois créés d’ici à 2030
- Par ailleurs, les femmes devront renforcer leur positionnement dans d’autres filières en croissance, comme les services professionnels, scientifiques et techniques, ou encore l’industrie manufacturière (qui représentent 40% des créations nettes d’emplois pour les deux pays). Elles pourront bénéficier d’opportunités nouvelles sur certains métiers dans ces secteurs (ex : ingénieurs en informatique, managers, etc.) à condition d’obtenir davantage de visibilité sur les gisements de croissance d’emplois et d’être accompagnées dans leur transition professionnelle.
Un impératif pour les femmes : investir sur les compétences d’avenir
- A l’échelle de l’Europe de l’Ouest, la demande pour les compétences dites « technologiques » devrait croître de 12 à 17% d'ici 2030, tandis que celle pour les compétences dites « sociales et émotionnelles » devrait augmenter de 19 à 22%. Les femmes seront en bonne position pour bénéficier de ces évolutions. En effet, elles occupent déjà les postes faisant appel à ces deux catégories de compétences à hauteur de 49% et 50% respectivement.
- McKinsey identifie néanmoins deux domaines où les femmes accusent aujourd’hui un déficit comparatif et sur lesquels elles devront engager un effort de montée en compétences :
- Les compétences technologiques avancées (programmation, analyse de données, design technologique) : à ce jour, les femmes représentent entre 40 et 43% des emplois faisant appel à ces compétences.
- Les compétences de leadership : à ce jour, les femmes ne représentent que 42 % des compétences de leadership employées dans l’économie. Or, ces dernières seront au cœur des besoins des entreprises « agiles » du futur.
La nécessité d’actions concertées de la part des pouvoirs publics et des entreprises
McKinsey identifie 5 leviers pour permettre aux femmes de bénéficier de cette transition :
- Créer de la transparence sur les besoins futurs aussi bien au sein des entreprises qu’à l’échelle nationale, à travers des efforts combinés de gestion prévisionnelle des compétences et de communication.
- Développer des programmes équitables de formation ou de requalification, pour les femmes comme pour les hommes.
- Favoriser une plus grande mobilité des femmes vers les secteurs d’activité en croissance alors que les bouleversements technologiques conduiront à une dé-linéarisation des parcours professionnels.
- Développer la proportion des femmes dans les carrières scientifiques (STEM) : ces efforts doivent commencer dès le plus jeune âge et notamment en s’attachant à réduire les biais culturels ou stéréotypes qui entravent l’orientation des jeunes femmes vers les filières scientifiques.
- Renforcer la place des femmes à tous les niveaux hiérarchiques des organisations : pour réussir le pari de la mixité, les dirigeants d’entreprises devront mettre en place un écosystème inclusif, qui s’inscrit dans le cadre d’un véritable projet de transformation de la culture d’entreprise, traité et suivi comme une priorité stratégique par la direction générale et relayé à tous les échelons.
Cette étude a été publiée à l’occasion du Global Meeting 2018 du Women’s Forum for the Economy and Society. Par ailleurs, elle a été présentée lors du CEO Champions Meeting, dont McKinsey est le Knowledge Partner. Cet atelier de travail organisé par le Women’s Forum rassemble près de 40 dirigeants d’entreprises. Les principaux enseignements de l’étude ont permis de nourrir les débats lors de cette rencontre.